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« Les cathares, une idée reçue ? » une exposition sur un sujet controversé

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À l’occasion de la 27e Fête de la Science, le laboratoire du CEMM de l’Université Paul-Valéry (Centres d’Études Médiévales de Montpellier) a présenté une exposition inédite sur l’histoire des « cathares ». Cette exposition, organisée par Alessia Trivellone (Maître de conférences en Histoire médiévale à l’Université Paul-Valéry) et impulsée par Isabelle Augé (Directrice du CEMM), s’inscrit dans le sujet de l’« idée reçue », thématique choisie pour la Fête de la Science 2018. À l’origine d’envergure modeste, le projet gagne rapidement en importance en dépassant les murs de Montpellier.

Grâce à cette opportunité, Alessia Trivellone ainsi que des étudiants du Master Mondes médiévaux ont exposé différents travaux, certains réalisés au cours d’un « Atelier thématique »¹ sur la diffusion de l’histoire. Des posters et des vidéos, ainsi qu’une BD, un jeu de société et un questionnaire véhiculent les acquis et les questions de la recherche récente à propos de l’hérésie dans le Midi : depuis vingt ans, des historiens remettent en effet en cause l’histoire traditionnelle qui voyait la présence de cathares dans le Midi, une légende qui remonte en réalité au XIXe siècle. Les sources médiévales, quant à elles, ne nous parlent que d’« hérétiques » : mais elles sont issues

presque exclusivement des pouvoirs qui ont combattu contre l’hérésie et le problème de l’objectivité de ces sources se pose.   

L'exposition ayant été enfin concrétisée, dès le vernissage du samedi 6 octobre, les réactions ne se font pas attendre. Par leurs nombreuses remarques, les visiteurs témoignent un intérêt teinté de respect pour les travaux. Étudiants de l’Université Paul-Valéry ou extérieurs, beaucoup de visiteurs ont été réceptifs aux nouvelles approches de l'étude historique sur l'hérésie. Fait particulièrement notable, plusieurs visiteurs âgés affirmaient connaître la croisade contre les Albigeois et ses conséquences politiques par leur formation scolaire, mais disaient connaître moins bien le terme de « cathare » : les manuels scolaires de leur époque auraient préféré le terme « d'Albigeois » pour indiquer les hérétiques médiévaux du Midi. Cela atteste que le regain d’intérêt pour les cathares dans les manuels scolaires est relativement récent et remonte à la deuxième moitié du XXe siècle. Ainsi, comme pour l'exposition, c'est toute une évolution du terme de « cathare » que nous pouvons constater, ce mot qui tend à s'imposer et qui croit pouvoir lier toutes les hérésies qui ont parcouru l'Europe médiévale.

Pour autant, hors du cadre de l'exposition, dans la presse et sur la toile, les remarques se sont révélées beaucoup plus acérées de par leur opposition idéologique avec le principe même de l'exposition. La parution de deux articles à une semaine d’intervalle dans le journal L'Indépendant² témoigne de ce clivage et du débat existant autour des cathares. 

Exposition à Montpellier du 6 au 13 octobre 2018. Photographie par Alessia Trivellone.

Exposition à la bibliothèque Diderot de Lyon du 17 janvier au 20 mars 2019. Photographie par Alessia Trivellone.

Ce débat prend de l’ampleur : la radio France Inter l’évoque dans sa chronique matinale et l’émission Dimanche en politique le 14 octobre 2018, sur France 3 Languedoc Roussillon, lui consacre une brève présentation. Les échos des débats traversent l’océan pour finalement être relayée dans la presse américaine dans un article du Los Angeles Times paru le 31 décembre 2018. L'idée même de réinterpréter les sources et de déceler la construction idéologique de l’hérésie est perçue dans certains milieux conservateurs comme une forme d'histoire "hypercritique". Les plus vives oppositions considèrent cette "dérive postmoderne" comme une volonté d'atteindre l'identité régionale cathare et de masquer ainsi la domination et l'oppression qu'ont subies les populations au cours de la croisade contre les Albigeois.

Un objectif dont l'exposition se dédouane évidemment : nier des constructions idéologiques n'équivaut pas à nier des événements politiques. Le rejet que l'exposition suscite sur Internet est un témoignage saisissant de la puissance des mythes et de leur intégration culturelle à l'histoire régionale. Depuis 1966, avec l'émission La Caméra explore le temps de Stellio Lorenzi, des Français ont découvert et se sont identifiés aux cathares. Une popularité dont le souffle ne semble pas diminuer, le mot « cathare » s'immisçant partout dans les labels touristiques jusqu'à la littérature. L'idée d'une secte locale combattue par l'autorité centrale parisienne a tout pour exercer la fascination de certaines populations de la région Occitanie. Ce renouveau historiographique que l'exposition cherche à présenter est au cœur de nombreux enjeux, qu'ils soient religieux ou identitaires (quand ils ne se combinent pas entre eux). Son rayonnement hors de la ville de Montpellier, à Nîmes (5-25 novembre 2018), Lyon (17 janvier- 20 mars 2019), Béziers (2 avril – 14 juin 2019), Fanjeaux (22 juin – 22 septembre 2019) et peut-être Créteil à l’automne, est donc une bonne nouvelle pour la diffusion des recherches scientifiques récentes de notre communauté universitaire. Loin de ternir ce projet, les controverses montrent l’intérêt de diffuser certains sujets en dehors du cadre de l’Université.

 

Tristan Picard, Océane Rosello

¹ Atelier dirigé par Alessia Trivellone dans le cadre du Master Mondes Médiévaux 2016-2018

² Journal d’actualité des Pyrénées-Orientales et de l’Aude.

Pages du livre d’or laissé à la disposition des visiteurs. Photographie par Alessia Trivellone.

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